dimanche 23 décembre 2012

ON EN A VU DES BELLES A BUGARACH

actu-match | jeudi 20 décembre 2012

Bugarach. Entre Simenon et Bogdanov

Bugarach. Entre Simenon et Bogdanov
Un musicien un peu spécial fait le show pour les journalistes dans la rue principale de Bugarach | Photo Pierre Terdjman

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Notre journaliste Rose-Laure Bendavid s'est réfugiée à Bugarach, village de l'Aude bientôt sauvé de l'apocalypse.


Nous partons de chez Jacqueline, « l’élue des anges ». Elle habite seule une immense et très jolie maison de 300 mètres carrés au Linas, à dix kilomètres de Bugarach. Méfiante, Jacqueline ne me parle pas de ses confidences aux êtres de lumière, elle joue même à la non croyante. Ceci dit, je passe un agréable moment à entendre des ragots sur les habitants du coin, qui viennent compléter ceux de Marie–Noëlle, notre logeuse: les maris coureurs, les femmes infidèles, les familles rivales depuis des générations. Une ambiance de village, en somme. Presque du Simenon, mais dans un univers à la Bogdanov. Cette ancienne infirmière du bassin d’Arcachon connaît tout le monde, et j’apprécie particulièrement le récit sur son ami Aimeric, qui habite Rennes-Les-Bains. Dans son magasin, il commercialise essentiellement des pierres, mais surtout des crânes en cristal: « Il les vend 77 euros, parce que le 7 est un chiffre sacré », explique Jacqueline. Avec Pierre, nous plaisantons qu’il ne les vende pas 333 euros, chiffre qui correspond à la Divine connexion. « Vu que tout le monde, dans la région, touche le RSA, il aurait du mal à en vendre à ce prix là ! », s’amuse Marie–Noëlle, qui nous accompagne partout, et parle beaucoup. Le matin, le soir, en voiture : tout le temps. Je ne sais pas encore si nous survivrons à l’apocalypse, mais je suis certaine qu’elle, en revanche, nous survivra tous. Aimeric possède un crâne original, estimé à 20 000 euros. Il n’en existe que treize dans le monde, et « si vous les possédez tous, vous devenez le Maître du monde ». Nous partons visiter la maison voisine, le refrain de la musique du film « Indiana Jones » en tête.

"Le Pic est l’un des douze vortex"

Genny Rivière s’est installée au Linas en 2003, bien qu’elle fréquente activement la région depuis 1999. Avant cela elle vivait en Haute Savoie, et ne cessait de rêver de châteaux en ruine, comme ils en existent dans la région. « Je comprenais que j’étais appelée à travers mes rêves, mais je ne savais pas où ». Un an plus tard, c’est le déclic, lorsqu’un couple d’amis lui parle du Pic et ses alentours. Elle délocalise son école de Chi Gong, une gymnastique chinoise, basée sur la connaissance et la maîtrise de l’énergie vitale, aménage une salle de cours, et se consacre aux énergies du coin. « Le Pic est l’un des douze vortex de la terre », explique- t-elle. Genny est sûre d’elle, et fait partie des figures incontournables de Bugarach. Elle a d’ailleurs écrit le best seller du coin : « L’appel du Bugarach » qui relate son expérience et son analyse personnelle. Elle estime que notre monde vit une crise, animée par la haine, le racisme et l’ignorance, et « qu’il ne nous convient plus ». De son vécu, Genny en tire une philosophie bien à elle : « Les systèmes politiques et religieux vont tomber et se transformer. Je ne comprends pas pourquoi la préfecture craint des suicides collectifs ». Parce qu’il y a eu des précédents, je réponds, il vaut mieux prévenir. « Si vous faites allusion aux membres de la secte du Temple du Soleil, ils ont été assassinés, ils ne se sont pas suicidés ». Elle parle de Gématrie, et de Kabbale, j’aimerais en savoir plus, car je trouve ça intéressant, mais elle me répond : « Achetez mon livre, 19 euros seulement ». Alors nous repartons près de la mairie, où parmi les dizaines de journalistes, arrivent quelques personnes qui croient en la fin du monde annoncée demain.
Frédérique vient de Marseille avec son frère, « pour rentrer dans le vortex ». Il est âgé d’une vingtaine d’années et lorsqu’on lui demande comment il imagine un vortex, il répond : « violet, comme dans les films », avant de poursuivre : « Je ne me suis pas beaucoup documenté dessus, mais avec une telle médiatisation, ça ne peut qu’être vrai ! ». Nous lui demandons si, toutefois il arrive à s’engouffrer dans son trou magique, il nous enverra une carte postale : « Non ! Vous êtes bêtes, vous ne la recevrez jamais, puisque je serais sur une autre galaxie ». Oumanie, un autre personnage emblématique me prend à part : « Tu sais, tout est en train de se mettre en place… Je vais t’emmener sur la montagne, où un couple d’amis à la chance d’y habiter. Passer la nuit là-bas c’est comme faire l’amour au bon Dieu ». Elle me dit que je parais « très accessible », et je commence à avoir un peu peur.
Demain nous serons le 21 décembre, et nous connaitrons enfin tous la vérité.Point final

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