mercredi 15 août 2012

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Publié le 15/08/2012 09:27
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Marie Rouanet au musée de Limoux

Les trésors du Grand Sud par… (2/6)

«La jeune fille aux oies», de Marie Petiet (1854-1893), un tableau parmi des dizaines, qui a touché l'écrivaine  Marie Rouanet./ Photos DR et DDM ()
«La jeune fille aux oies», de Marie Petiet (1854-1893), un tableau parmi des dizaines, qui a touché l'écrivaine Marie Rouanet./ Photos DR et DDM




Observatrice du monde et du passé, l'écrivain Marie Rouanet («L'Arpenteur», paru chez Albin Michel) n'est pas une adepte des «expositions événement» à suivre avec un audioguide sur l'oreille. Les trésors, elle sait les voir tout près de nous, derrière une façade presque anonyme. Lisez-la et vous irez à Limoux…
Après Claude Marti qui nous a fait découvrir hier Carcassonne, vous, vous nous emmenez aujourd'hui à Limoux...
Oui, à la découverte du musée Marie Petiet. Je vous conseille de partir à Limoux par la route de Saint-Hilaire, car dès qu'on a quitté Carcassonne, qu'on oublie très vite, on entre dans un pays d'une grâce absolue, florentine, avec ces carrés de vigne qui marquent la possession de l'homme sur la nature. Villages, maisons, plis de terrain, la route est tortueuse, on n'arrête pas de changer d'horizon, qui est toujours le même et jamais le même. Et tout d'un coup, se dresse une forteresse colossale, écrasante : notre dame de Marceille. J'aime m'y arrêter, mais au retour.
Alors, ce musée…
Arrivé à Limoux, il faut chercher la façade du musée, et ça me plaît. Rien de tonitruant, un simple rectangle noyé dans la façade de couleur bistre : «musée Petiet». C'est presque modeste, et pourtant c'est là, derrière cette porte vernie de belle maison, qu'on découvre une perle…
Les premières salles du musée ont été rénovées, à la manière moderne, qui est la calamité qui guette tous les petits musées : il y a moins d'œuvres, elles sont bien présentées, et on a choisi pour vous celles qu'on a estimées les plus belles. Vous n'avez plus la liberté du regard…
Enfin, j'ai trouvé là Achille Laugé, un pointilliste qui a eu son moment de renom, on y trouve le même paysage qu'on a vu sur la route. Il a peint la floraison des amandiers à la fin de l'hiver, ou la brume, au premier moment d'une journée qui s'annonce de grande chaleur, C'est une merveille, mais du Laugé on peut en voir ailleurs, et à Carcassonne.
Ensuite, on entre dans une salle inimaginable, consacrée à Etienne Dujardin-Beaumetz. Lui est un peintre militaire, c'est surprenant, parce qu'il fait de la peinture nationaliste, et pourtant intéressante. Ce personnage a été plusieurs fois député, sénateur, et secrétaire d'Etat aux Beaux-Arts. Son côté militaire ne l'a pas empêché de mettre en avant des choses très modernes, Manet, Signac, Matisse !
Et il est le mari de Marie Petiet
Oui, il a épousé la fameuse Marie Petiet. On arrive à elle dans des salles qui n'ont pas été arrangées à la mode actuelle. Il n'y a pas de symétrie, pas d'ordre, et là enfin, vous avez la liberté de choisir, la liberté d'aimer, de vous laisser emporter. On glane ce qu'on veut et dieu merci, dans les salles Petiet, on va être libre de se passionner pour une ou l'autre de ses toiles.
Marie Petiet est une fille de gros rentiers terriens, elle est elle-même de ce monde, mais sans le critiquer, elle regarde autre chose dans ses peintures. Dans «les Blanchisseuses», elle regardera du côté de la lingerie, elle montre la chef de dos, et on voit ces filles au travail, dans une très belle lumière… Marie Petiet n'est jamais revendicative, en montrant la beauté des gens modestes, elle dit pourtant beaucoup de choses.
Prenez «la jeune fille aux oies», elle est au marché, avec une oie dans ses bras. Elle a pris la plus malade -les oies grasses étaient vendues à la limite de la mort, avec leur foie hypertrophié qui écrase les autres organes… Cette bête, elle la câline, la caresse avec tendresse. Marie Petiet montre la pitié d'une fille du peuple. Elle m'a touchée, et tant mieux si vous aussi, vous êtes surpris et ému après avoir poussé la porte d'un vieux musée, d'une petite église…
«Cette bête malade, elle la câline, la caresse avec tendresse»

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